La culture d’entreprise dans les PME : ce supplément d’âme indissociable de l’attractivité

La culture d’entreprise est un sujet qui concerne 5,3 millions de personnes professionnellement actives en Suisse (chiffre du BFS au premier trimestre 2024), dont 99% de PME qui comptent moins de 250 employés. C’est beaucoup. Si j’ai choisi d’utiliser ces données, c’est pour mettre en évidence l’existence de cette incroyable richesse de cultures, nourrie par des milliers de petites et moyennes entreprises: un terreau fertile, encore à défricher pour aider ces entreprises à rendre leur culture plus visible et attractive.

Pour commencer à travailler ce terreau, je suis allée à la rencontre de chefs d’entreprise afin de mieux comprendre la façon dont ils vivent et véhiculent leurs valeurs et leur culture. Car c’est à partir du fondateur, du patron ou du dirigeant que ces éléments fondamentaux se dessinent et se transmettent. Dans ce vivier d’entreprises engagées, résilientes, flexibles et innovantes, j’ose affirmer que la culture est l’un des facteurs clé du succès. Je vous invite à le découvrir au fil de mon dialogue avec les chefs d’entreprise.

L’importance de la culture repose sur l’implication du dirigeant

Avec le lancement de Be.Shine, qui vise à aider les PME à développer leur attractivité grâce à une forte culture, j’ai souhaité rencontrer des chefs d’entreprise pour ouvrir un dialogue sur ce que signifie, pour eux, les valeurs et la culture dans leur organisation.

Pour tous, la culture d’entreprise est naturellement un thème connu, avec une reconnaissance unanime de son importance sur le bon (ou le mauvais) fonctionnement d’une entreprise. Et pourtant, au-delà du chef d’entreprise qui insuffle naturellement ses valeurs à ses équipes, il reste beaucoup à faire dans les PME pour expliciter ce qui inspire et motive les dirigeants, mais aussi pour mieux connaître ce qui est important pour les collaborateurs et comment ce que le chef d’entreprise transmet est perçu.

Car, même si la vision et la mission sont, à l’origine, portées par les fondateurs, qui devront un jour les transmettre à leurs successeurs, les hommes et les femmes qui travaillent à matérialiser ces intentions dans des produits ou services, doivent, idéalement, à leur tour, faire aussi correspondre leurs propres valeurs avec leur activité et avec l’organisation.

Ce cercle vertueux est essentiel à mettre en place pour construire une culture forte et unique.

Le changement : une opportunité pour ancrer la culture d’entreprise

Ces entretiens ont aussi mis en lumière les changements auxquels la majorité des PME rencontrées font face : départ d’un associé, changement de direction générale, succession, acquisition d’activités, intégration de nouvelles équipes, déménagement de site. De tels mouvements peuvent engendrer des résistances face au changement et nécessitent plus que jamais de pouvoir compter sur une forte culture. Pourquoi ? Parce que tout changement implique des remises en question, des craintes, des espoirs, qui doivent être considérés autant du point de vue du chef d’entreprise que des collaborateurs.

Ces aspects, constitutifs de chaque être humain, composent la culture et reposent sur des besoins individuels et collectifs qu’il est important de reconnaître. Le diagnostic culturel est ainsi une première pierre à porter à la construction du pilier de la culture.

Une culture distinctive ne peut exister sans supplément d’âme

Ce supplément d’âme, c’est quoi au juste. Sans doute quelque chose que l’on ressent, qui renvoie à la qualité d’une expérience vécue au sein de l’entreprise. C’est aussi l’histoire unique de chaque fondateur, de chaque entreprise qui, au fil du temps, crée de l’attachement entre l’organisation et les individus. Autant d’aspects humains que l’on retrouve dans la plupart des PME, comme une marque de fabrique intrinsèquement liée à une culture distinctive.

Christine Visinand Aubert

Fondatrice de Be.Shine SA
Spécialiste en communication et transformation culturelle d’entreprise

Préambule

A l’issue des onze discussions organisées dans des entreprises de 10 à 80 employés, et actives dans des secteurs tous différents, j’ai souhaité faire ressortir les éléments pouvant apporter un éclairage sur la façon dont les chefs d’entreprise rencontrés perçoivent l’importance et le rôle des valeurs dans la culture de leur organisation. Les observations qui suivent sont laissées à l’appréciation de chacun et se basent sur ce que Be.Shine estime pertinent de communiquer aux personnes intéressées par le thème de la culture d’entreprise dans les PME.

Observations

1. Les valeurs du dirigeant imprègnent la culture d’entreprise

• Le rôle et l’impact des valeurs personnelles du chef d’entreprise est clairement perçu comme très important dans la prise de décision et les interactions avec les collègues et les collaborateurs. Il s’agit d’un point essentiel qui montre que, en tant que dirigeant ou responsable d’une équipe, le respect de ses valeurs personnelles génèrent les réponses et réactions alignées avec qui nous sommes, et engendrent une satisfaction dans la qualité des interactions.
• La majorité des interrogés a spontanément mentionné que les valeurs du chef d’entreprise sont véhiculées implicitement et forment naturellement la culture. Plusieurs fondateurs ont exprimé cette corrélation disant « les valeurs de mon entreprise sont le reflet de qui je suis . Pour d’autres, les valeurs sont véhiculées par «la preuve par l’action » , ou « ce qui nous définit, ce sont nos actes ».
• L’impact des valeurs du chef d’entreprise est également reconnu comme « visible » dans la façon dont les services ou produits sont proposés sur le marché, surtout pour les entreprises innovantes ou qui contribuent à défendre une cause.

2. La culture basée sur la confiance instaure une grande fidélité

• Certains dirigeants, à la tête de structures allant de 10 à 20 personnes, ont développé une culture basée sur la confiance qui, au vu de leur taille, est certainement plus facile que dans une organisation de grande envergure. Toutefois, ces PME bénéficient d’un turnover quasi nul avec des collaborateurs très fidèles qui apprécient l’autonomie, l’ouverture laissée aux nouvelles idées et une importante flexibilité dans l’organisation de leur travail.
• Cette observation, basée sur un petit échantillon, mériterait d’être approfondie via un diagnostic culturel mené de façon individuelle avec le chef d’entreprise et, ensuite, avec l’équipe pour comprendre en profondeur quels besoins sont naturellement remplis pour soutenir l’engagement dans la durée. Ces résultats pourraient devenir des « best practices », utiles à d’autres PME .

3. Le sens et l’innovation sont des facteurs de motivation et d’engagement

• Les discussions ont fait ressortir trois principaux facteurs de motivation liés au sens de ce que l’on fait, « j’ai besoin d’être aligné entre qui je suis et ce que je fais » ou à la défense d’une cause « je suis fier d’aider cette entreprise à faire ce qu’on fait» – « sois fier où tu bosses ».
  L’innovation est aussi mentionnée lorsque les collaborateurs peuvent contribuer à « créer quelque chose qui n’a jamais existé » ou qu’ils bénéficient de temps alloué à « trouver de nouvelles idées » . « Nous développons une culture de passion et d’innovation qui permet à chaque collaborateur de disposer d’une demi-journée par semaine pour travailler sur un projet de formation ou d’innovation » ou encore permettre aux collaborateurs la prise d’initiative avec la « possibilité de relever un problème dans l’entreprise et de proposer une solution pour améliorer la situation ».

La culture influence la viabilité de l’entreprise

L’ensemble des chefs d’entreprise interrogés a spontanément reconnu l’importance et l’impact des valeurs dans la qualité de leurs relations, comme dans leur prise de décision et dans le rôle que ces valeurs véhiculent dans la perception des produits ou services vendus.

Bien que ces éléments soient implicitement constitutifs de la culture, une connaissance plus approfondie de ces perceptions n’a, à ce jour, pas encore été considérée par les dirigeants interrogés. Même si, pour l’un « notre mission ne figure nulle part. Elle se manifeste par les personnes qui travaillent dans l’entreprise », il est essentiel de comprendre plus précisément si les valeurs de cette culture implicite sont alignées avec les perceptions des collaborateurs et avec la mission de l’entreprise.

Si la mission de l’entreprise, pour autant qu’elle soit formulée, veut être vécue et menée à bien, les valeurs associées doivent rencontrer l’adhésion d’une majorité des collaborateurs, faute de quoi l’alignement entre les valeurs, la mission et la culture n’est pas optimal, ou n’existe tout simplement pas.

La question de la culture est donc tout aussi importante que l’objectif d’être une entreprise financièrement viable. Car la performance est intimement liée à l’engagement des collaborateurs. Et cet engagement est indissociable d’une solide culture d’entreprise.